samedi 29 décembre 2007

140° Et l'homophobie, dans tout ça ?

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Le Sarkozy circus et son big band occupe à ce point le devant de la scène qu’on finit par oublier que ce blog est en principe axé sur la lutte contre l’homophobie.

Or on sait que tous les droits sont liés au point que les observateurs s’accordent à considérer que l’examen du droit des femmes et des gays est un excellent baromètre des vraies libertés d’un pays. En France, puisque nous y vivons, nous n’en faisons pas une photo, comme pour préparer des vacances, mais un film, pour estimer leur évolution.

Et là, pas de doute : Sarkozy joue « Maman, j’ai rétréci les droits ». Que ce soit celui du travail, avec la démolition brique par brique du droit du travail, on en est cette semaine à la durée hebdomadaire, le droit au séjour, avec les expulsions comme au tir à pipes, les droits sociaux avec les radiations en chaîne des Assedic pour casser le thermomètre du chômage, le droit à la dignité des chômeurs de ne pas se faire traiter d’assistés qui glandouillent, le droit à la santé avec les franchises sur les remboursements de la sécu, le droit de se déplacer avec les suppressions arbitraires et non jugées de permis de conduire, il faut bien le reconnaître : jamais le droit des Français n’a été aussi malmené que depuis qu’ils ont élu un avocat à leur tête.

Les droits des gays, n’en déplaise aux inconditionnels du régime, sont pris dans le même tourbillon d’essorage à grande vitesse. Entre les promesses non tenues (éradication de Vanneste) et les mesures scélérates (le CUC qui réintroduit dans le code civil une notion d’homosexualité qu’on a mis 40 ans à retirer), les gays, en dépit d’apparences difficilement entretenues par Gaylib, n’ont pas la vie belle depuis mai 2007.

A cela, il faut ajouter que la gauche, ou ce qui en tient encore lieu, rivalise en imbécillité avec ce que la droite nous oppose en perfidie et en capacité de nuisance. Avec les déclarations religieuses dignes d’un prédicateur américain de Marlène Lanoix et Raymond Occolier, les deux élus socialistes de Martinique, le PS avait l’occasion de montrer que ce que le ménage que l’UMP ne savait pas faire avec Vanneste, lui savait le faire.

Raté. Les deux homophobes socialistes ont été gentiment entendus par une commission des conflits qui leur a fraternellement pincé la joue et peut-être un peu tiré l’oreille. Un blâme… comme à l’école. Comme un cancre reste un cancre, nos deux chrétiens de service sont rentrés au pays renforcés dans leur certitude que leurs croyances religieuses devaient passer avant leurs convictions politiques. Ils persistent et signent dans leurs errements discriminatoires, prêchant d’un côté l’oubli de leur communauté par la métropole tout en entretenant la haine et la discrimination de l’autre. Ce n’est plus de la politique politicienne, mais de la politique politicarde. Il y a des partis de tolérance pour cela, et ce qui reste du PS perd ce qui lui reste de crédibilité en fermant les yeux sur de tels accrocs dans les visées humanistes qu’il voudrait représenter.

D’autant plus que, mine de rien, France 2, dans son Journal télévisé, nous fait insidieusement le coup du morceau choisi en passant à l’antenne les plaisanteries d’ivrogne que Laurent Gerra répand volontiers sur Delanoë. Il est vrai que notre Bertrand, l’autre infatigable, remplit sa mission avec une volonté qui bâtit un consensus autour de lui, et que l’imitateur illustre ainsi la phrase de Boileau : « L’injure est l’argument de ceux qui n’ont rien à dire ».

Un bruit courait dans les milieux informés que la Bulgarie était un paradis pour les amateurs de garçons, et qu’un voyage à Sofia était une promesse de volupté pour les nostalgiques de la drague à l’ancienne, dans la rue, les parcs et les endroits non-dédiés. Damned ! Encore raté ! Un sondage vient de tomber, qui classe la Bulgarie au premier rang des pays européens pour l’homophobie ambiante, affirmant que seulement 17% des Bulgares accepteraient « d’adresser la parole à un homosexuel ».

Cela me rappelle ce crétin bien français, celui-là, avec lequel je venais de conclure une affaire avec beaucoup d’abnégation devant ses déclarations hyperdroitières, business is business, et qui me prenant les deux mains à témoin de sa satisfaction, m’affirmait le cœur sur la main : « Je savais qu’on ferait affaire, moi, je sens les gens, par exemple, les pédés, je les sens, je ne me trompe jamais ».

Bon, en Pologne, c’est le statu-quo. On ne pond plus de nouvelles lois homophobes, mais on n’a rien fait pour adoucir la rigueur des anciennes ni modeler l’opinion publique. Le nouveau premier ministre, Donald Tusk, n’a toujours pas daigné répondre aux associations qui lui ont demandé une entrevue.

Tchad, Angola, Iran, Irak ? A quoi bon? Revenons en France. Cela suffira à notre déprime.

Le BVP (Bureau de vérification de la publicité) vient de déconseiller vivement l’exploitation d’une affiche d’une campagne pour la prévention contre le VIH montrant deux hommes enlacés, ce que que Act-Up n’hésite pas à qualifier d’incompétence criminelle.

http://www.actupparis.org/article3242.html

Ci-dessous, quelques exemples d’affiches autorisées. Il faut savoir qu’en matière de publicité, les affiches pour les films et spectacles ne sont pas soumises aux mêmes critères que les autres. (Sans doute ne s’affichent-elles pas sur les mêmes murs…), ce qui nous avait permis en 2003 de contempler l’affiche du film de Bertolucci « Les Innocents » (« Dreamers » dans le reste du monde).

affiche acceptée


affiche acceptée


affiche acceptée


affiche acceptée


affiche refusée


affiche refusée

Souvenons nous de la condamnation par la justice d’un gentil pastiche du tableau « La Cène » de Léonard de Vinci, interdit d'affichage en première instance et en appel à la demande de l’association « Croyance et Libertés », bras séculier de la conférence des évêques de France. Du coup et grâce aux supercathos, notre jurisprudence, -pourtant supposée laïque-, s’enorgueillissait d’une magnifique définition du blasphème dans laquelle les mouvements islamiques commençaient à s’engouffrer lorsque, le 14 novembre 2006, dans un salutaire sursaut, la Cour de Cass, a débouté les croisés et rendu sa laïcité à notre arsenal législatif.

Civ1, pourvois n° B 05-15822 et W 05-16001, Bulletin 2006 I N° 485 p. 417

Il faut savoir que lorsqu’une affiche est « autorisée » ou pas déconseillée, il faut ensuite qu’elle franchisse les fourches caudines de la régie Métrobus, qui gère l’affichage du métro et des bus parisiens, premier afficheur de la capitale. (affiches Rainbow attitude refusées par Métrobus en septembre 2005, affiche Télérama pas bienveillante pour Sarko tout récemment).

Mais l’homophobie quotidienne, ce n’est pas que les injures et les cassages de gueule, les discriminations à l’emploi et les sarcasmes. C’est aussi un travail de sape, lent mais obstiné, que pratiquent sur notre vie quotidienne une catégorie d’intolérants qui se recrutent essentiellement, il faut bien le dire, dans les milieux religieux intégristes.

Témoin cette étrange bonne sœur en mission commando le week end en plein Marais, au milieu de l’animation et de la rigolade, appliquée à récolter tous les flyers qu’elle peut trouver dans un grand sac, puis à aller les déchirer soigneusement un par un (c'est du carton!!!) dans une poubelle. Ce qui ne l’empêche pas de s’attarder par moments avec une étrange nostalgie sur les mâles dénudés avant de les réduire en miettes. On a les plaisirs qu’on peut.

La cueillette...


...et l'exorcisme

Derrière l’homophobie officielle se cache, chez certaines gens, une homophobie aussi furtive que leur sexualité.


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