jeudi 4 décembre 2008

219° Parano, remaniement et Vatican

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Les nouvelles du front ne sont pas très bonnes.

Je parle des fronts sociaux ouverts un peu partout dans le champ de bataille qu'est devenue la France.

Le Canard Enchaîné titre « Sarko redoute une crise sociale ». Les deux ont bien raison. Ils sont même quasiment en retard. Elle a déjà commencé, la crise sociale... Le problème est que le second essaie de contourner l'obstacle au lieu de l'affronter, et que ça ne va pas le faire, comme on dit dans nos collèges.

Témoin ce « Complément d'enquête » sur France 2 ce lundi 3 décembre, complètement ciblé sur le sujet, avec deux thèmes sur la montée de l'ultra-gauche: les « saboteurs du TGV, des travailleurs qui voulaient faire sauter leur usine, et un petit sujet sur l'avenir du nouveau parti de Besancenot,

On sent les journalistes embarrassés: les travailleurs qui voulaient faire sauter leur usine expliquent très simplement et sans colère qu'il n'y a pas plus dangereux que quelqu'un qui n'a plus rien à perdre. Besancenot ne fait plus peur qu'à quelques baronnes de Neuilly, et l'affaire des « saboteurs du TGV » apparaît de plus en plus comme une crise éruptive de parano. (D'ailleurs, tous les « terroristes présumés » sauf deux ont été remis en liberté depuis. )

On découvre l'existence d'un livre qu'on les accuse de posséder, et même peut-être d'avoir écrit: « L'insurrection qui vient », petit ouvrage un brin sulfureux qui ne casse pas trois pattes à un canard, mais fait faire des cauchemars à nos services de sécurité intérieure. Sans doute ce livre serait-il passé inaperçu si nos grands flics ne lui avaient pas décerné, -tout à fait indûment- le goncourt du brûlot terroriste de l'année.

Voilà donc cet opuscule devenu célèbre. Par la grâce des censeurs, il est passé de la diffusion confidentielle sous le manteau à celle d'un succès international d'internet. La preuve :

http://www.lafabrique.fr/IMG/pdf_Insurrection.pdf

Version intégrale. Pourtant, si quelques mots y sont déplaisants pour un brave gendarme, il n'y a pas de quoi marcher au plafond. Cette soi-disant bible du terrorisme défonce plutôt des portes ouvertes. C'est un tissu de banalités et de lapalissades, mais ça doit seulement urtiquer ces messieurs de les voir écrites quelque part.

On y apprend qu'un bon saboteur ne doit pas se faire prendre, et que pour ce faire, mieux vaut rester anonyme et inconnu des services de police. Moi, je n'ai rien d'un terroriste, mais honnêtement, j'aurais trouvé ça tout seul.

On y découvre que la génération « spontanée » d'une insurrection possède l'avantage sur l'institution, la bande ou le parti organisé, d'être imprévisible et indétectable par les forces de police, ce qui semble une évidence, et qu'on tire davantage du chaos que d'une élection.

Le premier conseil, c'est au gouvernement qu'il faut le donner, qui multiplie les mesures anti-sociales et impopulaires à une vitesse qui prend de court la constitution d'une opposition organisée (qui par ailleurs se débrouille mal), et appelle donc les explosions spontanées telles que celles des banlieues fin 2005.

Quant à titrer davantage du chaos que de la démocratie, c'est assez relatif si on s'en réfère aux résultats des élections ayant suivi mai 68, par exemple, avec la fameuse « chambre bleu horizon » à 73% à droite dans laquelle les Français avaient trouvé l'exutoire à leurs petites frayeurs...

Parce qu'au rayon « je multiplie les gaffes », le régime umpiste est d'une stupéfiante productivité: pour être élu, le petit fâcheux avait promis qu'en deux ans, il n'y aurait plus un seul SDF. Comme quelques irréductibles persistent à agoniser dans la nature, on envisage toutes les solutions sauf la bonne, qui consisterait à leur proposer une piaule suffisamment convenable pour qu'il n'y ait pas besoin de les y enfermer. Mais non...

Pourquoi se compliquer à faire simple alors qu'il est si facile de faire compliqué?

Sarko a tout fait, tout promis pour Mittal: subventions (surréalistes vu la prospérité de l'entreprise), menaces, il a été faire un show télévisé sur place le 4 février 2008, s'est agité jusqu'à l'ONU, et maintenant que le couperet est tombé.... il se couche tristement en s'abritant derrière la fatalité d'une crise que même Mittal déclare pourtant ne pas craindre, ses prévisions pour 2008 restant parfaitement dans le vert.

(Mittal, premier groupe sidérurgique mondial, 320 000 employés dans 60 pays, a réalisé en 2007 105 milliards de dollars de chiffre d'affaire dont 10,4 milliards de dollars de bénéfice...)

Déchiré entre la posture ultra-libérale exigée par ses mécènes et la nécessité de remettre le facteur humain au centre de l'économie attendue par ses électeurs, Sarkozy, à la tête d'une France où une politique de droite dure reste intenable et les idées de gauche déjà représentées, tant bien que mal mais néanmoins, par d'autres que lui, surnage sur un bouillonnement de grogne qui monte, qui monte, et atteint le rebord de la marmite.

Car la masse des « citoyens qui ne sont pas de droite » est en France beaucoup plus à gauche que dans d'autres pays auxquels il rêve de nous faire ressembler. Qu'il s'agisse de l'Angleterre, de l'Espagne ou des Etats Unis. Même le parti socialiste pendant sa déconfiture, continue à exister par sa masse et par le poids idéologique qu'il représente au point de rendre bien difficile l'émergence d'autres partis de gauche à ses côtés.

Dans les pays anglo-saxons qui font rêver le petit Nicolas, on a le choix entre blanc bonnet et bonnet gris. Chez nous, le bonnet pas blanc est bien rouge, ou en tout cas rose bon teint.

Alors, suivant une terminologie usée jusqu'à la trame par la langue de bois populiste, le régime s'agite et saupoudre. Mais le drame du saupoudrage est qu'il suffit à remplir des colonnes de journaux, (pas toujours de compliments d'ailleurs), mais qu'il ne suffit pas à résoudre les problèmes.

Les SDF sont toujours dans les rues, les fins de mois de plus en plus difficiles, ceux qui veulent acheter des maisons et des voitures se voient offrir primes et crédits, mais pas ceux qui veulent acheter du beefsteak.

Et en attendant, on s'agite et on fait de la parano. Exemple sur les fameux saboteurs du TGV. On a cru avoir arrêté de nouvelles brigades rouges, qu'on affuble d'une avalanche de qualificatifs qui marquent plus la panique et l'incompréhension que la réelle perception du problème à sa petite échelle. A les entendre, ils avaient découvert un complot d'ultra-gauche révolutionnaires trotzkistes avec le couteau entre les dents qui allait démarrer une guerre civile.

Déception. Quelques éleveurs de chèvres et un patron de bistrot, libérés depuis, dont peut-être et encore sous réserve, le leader semble plus affirmé que les autres. Il possède, comble de l'horreur, le « livre interdit » et cette armée de l'ombre aurait infiltré (démenti depuis) des milieux hautement techniques à la SNCF pour concevoir les fameux crochets à caténaires.

Tout cela rappelle un peu l'époque où on arrêtait les gens parce qu'ils possédaient à la maison l'encyclopédie de Diderot ou le dictionnaire philosophique de Voltaire., eux aussi « capables de renverser l'ordre du monde »...

Je ne veux pas cracher dans la soupe, mais je pense vraiment que nos gendarmes et autres maîtres Pandore sont très nuls dans l'art du bricolage s'ils croient qu'il faut être ingénieur pour inventer le hameçon à caténaires. S'ils viennent dans mon salon, ils pourront voir un téléviseur plat de grande taille circuler à 1,5 m du sol grâce à un rail au plafond, se ranger derrière un escalier quand on n'a pas besoin de lui, survoler escalier et radiateur pour venir se placer devant la fenêtre quand on veut le regarder, dans une position où il peut, toujours accroché à son rail, pivoter de 90° pour faire face au canapé ou à la table ... Tout en restant, bien sûr, connecté à tous ses accessoires d'alimentation, d'entrée et de sortie de signal.

Parce que je suis un bon bricoleur. J'ai fait des plans, imaginé, improvisé aussi un peu, scié, soudé, percé, vissé, et voilà le travail. Alors, honnêtement, je n'ai jamais eu l'idée de saboter un TGV, je ne l'aurais pas acceptée si on me l'avait demandé, mais un truc comme le crochet à caténaires, au niveau purement technologique, je l'aurais inventé en une après-midi s'il avait fallu. Il n'y a que dans l'esprit des paranoïaques en charge de notre protection qu'il faut être ingénieur à la SNCF pour pondre un truc aussi simple. Le problème le plus épineux ne me semble d'ailleurs pas de concevoir le gadget, mais d'aller l'accrocher à 5 ou 6 mètres en l'air à un câble où passe un courant alternatif de 25 000 volts sans se faire coiffer en brosse.

Non, messieurs de la sécurité intérieure, une boîte à outils n'est pas un accessoire de terroristes! Sinon, méfiez vous du réparateur de votre machine à laver!

Alors pourquoi des suppositions à ce point irréalistes? Pourquoi ce triomphe peu discret « On a arrêté une effroyable cellule dormante de terroristes » ? Qui a fait pschiit en quelques jours?

Fait-on un pareil battage brandissant une "mise en danger de la patrie" avec "complot international" lorsque des agités d'extrême droite incendient immeubles, mosquées et synagogues, dévastent les cimetières, passent des membres d'autres communautés à tabac, attaquent des manifestations autorisées et pacifiques, assassinent leurs contradicteurs?

Il est trop tard, messieurs du pouvoir, pour faire face au mécontentement. C'est à ses causes qu'il faut s'attaquer. On ne guérira plus le mal avec des baumes et des cataplasmes, c'est aux sources qu'il faut porter le fer. Abriter les SDF au lieu de les escamoter, aider les gens au lieu des banques, subventionner le beefsteak au lieu des voitures (largement fabriquées à l'étranger), augmenter les salaires et pensions au lieu des dividendes, si tant est qu'avec la posture qui fut la vôtre depuis que vous êtes élus, on peut encore croire que vous en êtes capables.

Parce que les plans dans les cartons ne laissent pas augurer de votre regain de popularité. D'après des sources qui en valent bien d'autres, lors du remaniement du début 2009, Brice Hortefeux, après avoir accédé à quelques responsabilités médiatiques comme la reprise en main de l'UMP, deviendrait ministre de l'intérieur et Patrick Devedjan obtiendrait enfin le maroquin qu'il réclame à grands cris depuis qu'il demande que "l'ouverture soit étendue jusqu'aux sarkozistes"...

La deuxième manche des éliminatoires va être saignante...




Ceci dit, on ne va pas se plaindre de quelques aspects du saupoudrage.


Cela se passe à l'ONU, où Rama Yade a tenu sa promesse, et la France déposé un projet tendant à dépénaliser l'homosexualité au niveau international, homosexualité qui est encore, dans de nombreux pays, passible de peines de prison ou de mort.

Et l'un des opposants les plus violents à cette proposition est le porte-parole du Saint-Siège, le père Federico Lombardi, qui fait plus de bruit à lui tout seul que tous les autres intégristes réunis.


Le bonhomme voit là une manœuvre politique visant « à déconsidérer l'idée du mariage entre un homme et une femme comme la forme fondamentale et originelle de la vie sociale ».

Photo AFP (Jacques Demarthon)
Et le « saint homme » n'hésite pas un instant, bien sûr, à continuer à exposer des millions de gays à travers le monde à la prison et à la potence pour ne pas laisser approcher le spectre de l'horreur absolue, qui est pour lui l'adoption d'enfants par des gays. A-t-on vraiment progressé depuis les croisades où on disait aux infidèles « la conversion ou la mort »?

Eh bien, la délégation française tient tête à la cabale, dans un débat où si distingue la haute voix de Eric Chevalier, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères. Dont acte. Ce n'est pas tous les jours qu'un umpiste tient parole. Ceci dit, notons que Rama Yade a décidé de quitter le navire gouvernement avant l'iceberg pour se présenter en avril aux élections européennes. Sage décision.

Mais est-ce un vrai umpiste? Eric Chevallier, quarante-sept ans, proche de Bernard Kouchner, docteur en médecine, diplômé de l’IEP Paris, a été appelé, en 1998, comme conseiller au cabinet de Bernard Kouchner, secrétaire d’Etat à la Santé, puis représentant spécial du secrétaire général de l’ONU au Kosovo, avant d'être nommé récemment porte parole du Quai d'Orsay et conseiller spécial du ministre.

A suivre...



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