samedi 21 février 2009

236° Au diable Staline. ( Les noces silencieuses)

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Il fut une époque où les distributeurs changeaient les titres des films étrangers pour les transformer en slogans racoleurs franchouillards.


C'est ainsi que « High Noon » devint « Le train sifflera trois fois », « The gang is all here » devint « Banana Split » , « All That Jazz » devint « Que le spectacle commence » « Anchors aweigh » devint « Escale à Hollywood », « Cover Girl » « La reine de Broadway », « Annie get your Gun » « La Reine du Cirque », « Born to dance » « L'Amiral mène la danse », « Dangerous when wet » « Traversons la Manche », « Yankee Doodle Dandy » « La glorieuse Parade », et « Swing Time » « Sur les Ailes de la danse ». . Je vous en passe.


On croyait cette époque où l'on vendait des films comme des tapis révolue. Eh bien non, et cette détestable manie vient de frapper un petit chef-d'oeuvre, « Noces silencieuses » (« Nunta muta ») qu'on trouve à l'affiche sous le doux nom de « Au diable Staline, vive les Mariés ».



Ce discret film roumain, co-réalisé par Vlad Popescu qui s'était jusqu'ici plutôt intéressé à la production, et Horatiu Malaele, comédien (vu notamment dans « Amen », le précédent Costa Gavras) qui est passé pour l'occasion derrière la caméra sort en ce moment de manière un peu confidentielle dans un circuit de salles très insuffisant.


Et pour un coup d'essai, c'est pourtant un coup de maître. Il est vrai que les deux compères connaissent leurs classiques, mais le cinéphile ne se promènera pas pour autant dans le film comme dans un musée des hommages et des coups de chapeau.


Il y a du Tati dans les longs plans muets qui parlent si bien et qui font exploser la salle de rire au bout d'un moment d'étonnement, il y a du Fellini, beaucoup de Fellini dans ces personnages rougeauds aux limites de la caricature, aux gestes inattendus, aux couleurs fortes, à l'expression tonitruante, un brin de Kusturica dans les scènes orgiaques et la musique tzigane, il y a aussi un zeste de Bunuel dans les anachronismes et les situations surréalistes qui s'intègrent si naturellement dans la logique de l'histoire, beaucoup d'émotion dans des situations que je vous laisse aller découvrir, et on passe de la comédie au drame absolu dans la plus belle tradition de la Comedia del Arte.



Le parti pris graphique indispose au début avec cette mode que je déteste qui consiste à filmer en caméra à l'épaule et en scope les personnages à bout portant en leur coupant le front et le menton, ou avec des plans à fond de zoom qui défigurent toutes les perspectives. Mais sans doute le film a-t-il été tourné relativement « dans l'ordre » et quelques critiques entendues à la projection des rushes puisque cette manie disparaît dès la deuxième bobine avec l'arrivée d'une looma et l'adoption de plans plus larges.


Par contre, l'impeccable colorimétrie, le piqué soigné et une qualité photographique réelle compensent assez largement ces petits désagréments.


Le propos n'est même plus anti-communiste. L'humour de l'œuvre possède un tel recul qu'on sent bien que cette noire période, -elle fut effroyable dans la Roumanie de Ceaucescu- est déjà entrée dans les livres d'histoire, et que les Roumains, forts d'un humour désabusé et dévastateur, n'ont pas le sentiment que ce qu'on leur propose aujourd'hui soit plus prometteur. S'ils sont latins par la dérision et ce sens de l'humour surréaliste, ils sont orientaux par leur fatalisme. C'est ce doux mélange qui donne au film son cachet inimitable.



A quoi sent-on qu'un film est réussi quand on n'est pas technicien? Parce qu'en « retombant sur terre » lorsque la salle se rallume, on réalise qu'il vous avait emporté loin et haut au pays des rêves.

« Au diable Staline » est de ceux-là. Ne le manquez pas.




Les collections de montres sont très à la mode en ce moment. Julien Drey collectionnait les « montres à complications » (terme technique de tocantologie), notre turboprésident, lui, demande à une montre d'être grosse, brillante, et de dépasser du poignet de la chemise. Volant au secours de son nouvel ami élyséen, Jacques Séguéla, toujours du côté du manche, voit les choses avec une grande désinvolture.

"si à 50 ans on n'a pas une Rolex, on a raté sa vie" a-t-il assuré sur Antenne 2.


Le personnel d'Antenne 2 qui a reçu Séguéla dans le studio affirme à l'unanimité que lors de son interview, Séguéla ne portait pas de Rolex... Damned. Ce n'est pas étonnant que la France soit dans l'état que l'on sait si elle compte plus de 55 millions de ratés...






Quelle que soit leur montre, il y en a tout de même certains à qui il faudrait remettre la pendule à l'heure.

Le petit Besancenot est allé à la Guadeloupe apprendre comment on organise une grève générale. Ce n'est pas très habile de sa part de l'avoir avoué, car nombre de ses fidèles auraient pu supposer qu'un pilier de la ligue communiste révolutionnaire maîtrisait suffisamment le problème pour se dispenser d'un stage de perfectionnement. Il manque au nouveau parti anticapitaliste un bon communicant, mais je ne saurai lui conseiller Séguéla, le slogan « une Rolex pour chaque Français » ne me semble pas très porteur.



Enfin, il est grand temps d'introduire dans le dictionnaire de l'Académie Française et dans notre belle langue en général un mot merveilleux, expressif, précis, plein de vigueur et de sens profond, issu du parler antillais pour décrire la façon dont la métropole traite les dom-ton : la « profitation ». C'est tout de même autre chose que la bravitude!


A bas la profitation !



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