samedi 15 octobre 2011

398° Copwatch : Souris 1, chat 0



L'ordre public et la tranquillité d'une démocratie ne résultent pas de l’application d'une chape de répression comme semblent l'imaginer certains droitistes depuis Pasqua, en passant par Sarkozy, Hortefeux et Guéant. C'est au contraire le fruit d'un délicat équilibre entre le respect de tous les citoyens, avec des ingrédients indispensables comme la cohésion nationale, l'intégration de tous, l'accès universel à l'instruction et à l'éducation.


C'est dire à quel point depuis le « terroriser les terroristes » du grand ancêtre jusqu'à la « tolérance zéro » du petit dernier, la France s'est éloignée de ce fragile éden. A cela, il faut ajouter l’incompétence de ceux qui croient toujours que la force brute va suppléer au savoir et à la connaissance, témoin par exemple cette proposition de loi surréaliste et puérile d'un député UMP qui pensait qu'on pouvait interdire la pornographie en appuyant sur un bouton...


Le tout-répression mène à l'insurrection , et quand l'insurrection prend le maquis, elle utilise des moyens techniques que la force seule ne peut plus maîtriser.

Car la seule manière d’empêcher l'accès à un lien internet est de couper tout l'internet. Sinon, le lien, bloqué à grand frais se multiplie comme par magie. C'est ce qui vient d'arriver à Monsieur Claude Géant, Ministre de l'Intérieur, de l'Outre-mer, des Collectivités locales et de l'Immigration.


A force d'envoyer des policiers et des CRS dépersonnalisés, volontiers violents, sans numéro, sans uniforme, non identifiables, à l'assaut de pauvres gens sans recours, il a fini par agacer. Disons qu'il récolte aussi la colère accumulée par les agissements de ses prédécesseurs. Alors, il s'est créé en France un site, Copwatch, à l'instar de ce qui existe de la manière la plus légale et la plus répandue aux USA et au Canada.


Ces sites répertorient les méthodes policières, enseignent aux manifestants et aux protestataires comment en éviter les foudres, les contourner et si nécessaires leur riposter, voire leur opposer le retour de bâton de la loi. Comme au Canada et aux USA, les forces de l'ordre ne se gênent pas pour afficher la tronche de leur manifestants préférés sur leurs sites, les réseaux Copwatch font de même avec les policiers les plus hargneux. Tout cela est de bonne guerre, mais ne correspond pas à la mentalité européenne, avec sa connotation latine, « les pouvoirs du chef » et sa propension à la dictature.


Et comme nos chefs croient que force vaut compétence, Monsieur Claude Géant, Ministre de l'Intérieur, de l'Outre-mer, des Collectivités locales et de l'Immigration a demandé au Tribunal de Grande Instance de Paris de bloquer en référé les adresses du site Copwatch-IdF et Copwatch-Calais qui publient photos et références personnelles des policiers visés, démasquant en particulier ceux qui ont l'habitude d'agir en civil. La démarche était finaude : on autorise le site à exister, au regard de « la liberté d'expression », et on ne censure que les pages de « outing », au motif d'atteinte à la vie privée.


C'était bien vu si internet était un service aux ordres. Mais internet ne l'est pas et n'obéit à personne, comme l'ont appris à leurs dépens les députés qui croyaient pouvoir interdire la pornographie. Internet, on coupe tout, ou rien. Et encore... On a toujours eu des images de Lybie, de Syrie, etc. Au compte-goutte certes, mais le robinet est impossible à fermer complètement.


La lecture du jugement permet de comprendre que le pis aller consistait, pour les fournisseurs qui n'y peuvent rien, à bloquer l'accès d'un site entier, ce qui est déjà difficile et coûteux, mais certainement pas certaines pages du site. (qui auraient changé de nom tous les jours... de toute façon!) .


Or le site Copwatch est en « https:// », sécurisé comme celui de votre banque, c'est à dire que les services les plus compétents sont à ce jour incapables de remonter sa trace et de le localiser. Et à plus forte raison d'identifier ses auteurs... N'oublions pas qu'il appartient à une nébuleuse internationale qui fait qu'on ne sait pas où il se trouve (« in the cloud »...), qu'il est mobile à merci et donc insaisissable par une quelconque autorité, et ceci d'autant plus que le principe en est légal dans de nombreux pays où il peut toujours se réfugier... Chez « Amnesty International », les pays en infraction ne sont jamais dénoncés par leurs propres ressortissants. Sans doute en est-il de même chez Copwatch. Cherchez « Copwatch » sur Google-web et sur Google-images pour vous en persuader. Il y a des antennes dans presque toutes les villes américaines !


Voilà donc le tribunal, pour satisfaire Claude Guéant, obligé de recourir au blocage total de Copwatch en France. Seulement voilà : pendant que l'administration fait sa petite cuisine franco-française, internet vit sa vie. Avant même la décision du tribunal, 26 sites miroir du site interdit étaient répertoriés , et nul doute qu'il y en aura d'autres et des nouveaux tous les jours.

Claude Géant aura toujours un couteau propre à force de le planter frénétiquement dans l'eau... et il subit la punition de tous les censeurs : rendre célèbre un site qui, sans les poursuites dont il est l'objet, n'aurait connu qu'une existence discrète et marginale.... Quand on sait ce que coûte la publicité sur internet, et même le référencement sur Google, Copwatch peut dire merci à Monsieur le Ministre de l'Intérieur, de l'Outre-mer, des Collectivités locales et de l'Immigration pour cette magnifique publicité.


Ajoutons pour terminer que lorsque notre belle télévision nous dit que Saint Claude a triomphé du dragon Copwatch en le faisant interdire, elle oublie de nous dire que ça va nous coûter très cher. Car le jugement -lisez le-, prévoit que les fournisseurs, qui n'y sont pour rien, enverront les factures afférentes à ce blocage au Ministère...


8 Février 2012:

http://www.pcinpact.com/news/68797-copwatch-parquet-claude-gueant-inconcevable.htm

Souris 2, chat 0






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