samedi 15 novembre 2014

490° Ouille, dit la mouche.







Les chroniques politiques résonnent de deux débats surprenants, Mélenchon contre Assassin's Creed Unity, et l'altercation bistrotière de Fillon et Jouyet.

Pour parler brièvement de cette dernière, ce que je trouve scandaleux dans cette histoire de crocodiles politiques qui se donnent des coups de dents, ce n'est pas tant qu'ils s'étripatouillent, un saurien reste un saurien, mais qu'ils se voient pour un déjeuner de routine chez Le Doyen pendant que les Français recomptent leurs dernières pièces devant la main tendue de la caissière du supermarché.

Le site de Le Doyen, long à charger, ne montre que des textes et des photos lénifiantes, n'indique aucun prix et ne parle que de prestige. A la rubrique prix, Google indique « €€€€ ». Pour en savoir plus, il faut consulter le guide Michelin, qui nous dit qu'il y a un petit menu pour le déjeuner en semaine à 128€ hors boissons, et un menu du soir à 295€. 



J'essaie de resituer tout cela dans la vie des Français moyens que nous sommes, et que ces gens là, en principe, représentent. Pour deux, 128€, c'est dix jours de supermarché, boissons comprises. Mais parfois, aussi, en petit gourmand que je suis, quand je veux déjeuner avec un ami, je vais volontiers au restaurant. Pour cela, j'ai une liste d'excellents établissements à moins de 30€….

Alors, bon prince, je veux bien que messieurs nos élus aillent dans des restos d’une catégorie supérieure aux miens. Ça m'arrange même, parce qu'ainsi, je suis sûr de ne pas les rencontrer dans les miens. Mais personne, aucun journaliste, pas le moindre chroniqueur, n'a eu l'idée de relever que pour un déjeuner de routine, ces messieurs fréquentaient de la manière la plus courante un des établissements les plus chers de Paris…

Pour en revenir à la colère qui semble s'emparer du tourmenté Mélenchon à l'encontre du non moins agité jeu Assasin's Creed Unity, là encore, c'est aux journalistes que j'en veux.

Tous ces intellectuels déconnectés qui vivent de leurs péroraisons et se complaisent à flatter l'étroite cour de leurs semblables me flanquent de l'urticaire. Il y a quelques mois, j'ai jeté mon verre de vin au visage au visage d'un « critique  musical » qui m'avait affirmé que si un rappeur dont j'ai oublié le nom avait été interdit de séjour dans plusieurs pays européens à cause de la haine homophobe qui dégoulinait de ses chansons, c'était un scandale : au titre de la licence poétique et artistique, un rappeur avait le droit d'être homophobe ! Alors, si vous voulez déjeuner avec moi, faites attention à ce que vous dites, ou alors servez moi du très très bon vin pour ne prendre que de l'eau à la figure.

Avec la guerre déclarée par Mélenchon à Assasin's Creed Unity, la fine fleur du snobisme parisien a encore évité avec son brio habituel une nouvelle occasion de se taire :

« Oui, Assasin's Creed Unity est un jeu de fiction, basé sur le caractère quasi mythique des personnages, il est normâââl qu'on prenne quelque libertés avec l'histoire, il fallait bâtir un scénario, il ne faut pas prendre à la lettre ce qui n'est qu'une stylisation, ne pas s'attacher à la réalité historique, les gens sont assez grands pour faire la part des choses», etc.…

Alors, moi, je propose le test grandeur nature : Allons avec un micro-trottoir chez un marchand de jeux video et demandons à l’aimable clientèle qu'on y rencontrera qui était Robespierre, à quelle époque il a vécu et pour qui il roulait.

Si on a 30 % de bonnes réponses, c'est un bon jour. Je vous rappelle que 46 % des Français ne savent pas à quoi correspond le 11 novembre, alors qu'ils bénéficient, à ce titre, d'un jour de congé tous les ans depuis la maternelle… Alors Robespierre, tu imagines !

Certes, Maximilien n'était pas un rigolo, même si, je le rappelle, il a défendu l'abolition de la peine de mort et de l'esclavage, le droit de vote pour tous, gens de couleurs, comédiens, juifs. Après, évidemment, ça a foiré un peu, mais la politique, vous savez, déjà à l'époque….. Devant la hargne de la droite réactionnaire, il a du se défendre jusqu'à instaurer la terreur, ce qui est, j'en conviens, paradoxal pour un ennemi de la peine de mort, mais concédons lui que ses opposants versaillais, eux, au nom de dieu et du roi, l’appliquaient avec sauvagerie…

Là où son action a échoué, c'est quand il a été le seul et le premier à comprendre que la « déchristianisation » ne pouvait pas s'appliquer brutalement puisqu'à cette époque, l’église détenait l'état civil, l'enseignement, la santé, la justice, autant de fonctions régaliennes qui ne pouvaient disparaître soudain sans qu'on prenne le soin et le temps de les remplacer. En la ralentissant, il s'est déconnecté des révolutionnaires fonceurs, et s'est retrouvé bien seul… 




Bref, les amateurs de causette peuvent gnoser pendant des lustres sur Robespierre, mais pour en revenir au cœur du sujet, ce n'est pas une raison pour en faire un monstre bestial à la Terminator, réintroduire les Templiers dans l'histoire à une époque où ils en étaient absents, et se livrer à de louches manipulations de film d'horreur sur les héros de notre histoire. Mélenchon a, sur ce coup, absolument raison. 

Que diraient les Américains si on accommodait George Washington ou Abraham Lincoln à pareille sauce ? 

Pour la petite histoire, le wikipedia du restaurant Le Doyen nous apprend que Robespierre y a déjeuné avec Saint Just en 1794, deux jours avant leur exécution. Damned ! Encore raté !


Alors, les gloseurs et autres masturbateurs de méninges, vous savez ce que je leur dis ?




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